top of page
Rechercher

VALEUR SENTIMENTALE

  • Photo du rédacteur: Émilie REDONDO
    Émilie REDONDO
  • 21 sept.
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 22 sept.

Année de sortie : 2025

Durée : 2h13

Genre : Drame, comédie

Réalisé par : Joachim TRIER

Casting :  Renate REINSVE, Stellan SKARSGÅRD, Inga IBSDOTTER LILLEAAS, Elle FANNING, Anders DANIELSEN LIE, Jesper CHRISTENSEN, Lena ENDRE, Cory Michael SMITH, Catherine COHEN

 

Synopsis : Nora est une comédienne de théâtre rongée par ses névroses. Agnès, sa sœur universitaire, s'est construit une vie de famille. A la mort de leur mère, elles voient débarquer leur père, absent depuis de longues années. Réalisateur de renom, il propose à Nora de jouer dans son prochain film, mais celle-ci refuse avec défiance. Il propose alors le rôle à une jeune star hollywoodienne, ravivant des souvenirs de famille douloureux.

 

Bref : Une histoire de famille universelle, qui a le mérite de faire un tour d'horizon, sans compromis, de tous les points de vue. Un film généreux et lumineux.

 

Dans son roman Anna Karénine, Léon TOLSTOÏ écrivait : "Toutes les familles heureuses le sont de la même manière, les familles malheureuses le sont chacune à leur façon". Cela résume parfaitement l'intention du film de Joachim TRIER, celle de montrer le malheur particulier de cette famille.

 

Avec une grande subtilité, le réalisateur embarque le spectateur dans un voyage imprégné de mélancolie, dont l'épicentre est la famille. Une famille brisée, éclatée, dont les membres semblent n'être que des électrons voués à s'entrechoquer ou à se repousser.

 

Le réalisateur joue les chefs d'orchestre, passant sans cesse d'une vision globale de la famille, aux perspectives émotionnelles de chacun. Sa technique souple et fluide imprime un rythme indolent qui suit les différents parcours, insérant des éléments clé par de courts flashbacks qui se mêlent au présent et apportent un éclairage nouveau sur les événements.

 

L'histoire universelle de cette famille touche non seulement par la "banalité" de ses problèmes, mais surtout par l'empathie que cela ne manque pas de créer chez le spectateur. Chaque composant est important et mis en valeur par des ambiances cohérentes. Le travail sur les différentes séquences est impressionnant.

 

Il allie parfaitement des compositions d'images recherchées avec une technique simple (des cadrages précis et une maîtrise des mouvements), axée sur les jeux de regards, complété par une photographie complexe, mais magnifique (du fait des changements de saison). La liberté de jeu, laissée à ses acteurs, laisse transparaître la profondeur des blessures et la violence des sentiments.

 

Pour autant, Joachim TRIER ne tombe jamais dans l'accablement. Son casting impeccable de justesse délivre des émotions d'une rare authenticité, soulignée par une musique originale, puissante et sensible, si bien qu'elle prend à la gorge.

 

Il prend le temps d'explorer la psychologie de chaque protagoniste. Tous les maillons peuvent exprimer leur douleur, l'une par des crises d'angoisse avant de monter sur scène, l'autre étouffée par ses non-dits, le dernier trouvant dans l'écriture d'un scénario un moyen de faire la paix avec son passé et d'extérioriser ses émotions.

 

Suite au décès de la mère, ancienne psychothérapeute, le père absent (formidable Stellan SKARSGÅRD) revient vers celles qui restent ses filles. La fille aînée, interprétée avec brio par Renate REINSVE, dévorée par une rancœur tenace, rejette ce père, qui n'est pour elle qu'une personnalité publique qui a abandonné sa famille. Sa sœur cadette (émouvante Inga IBSDOTTER LILLEAAS), figure calme au milieu de cette guerre froide, parvient à peine à faire entendre sa propre souffrance.

 

Catalyseur du dénouement familial, ce décès met pourtant la mère (et son héritage émotionnel) au cœur du paradigme instauré au départ du père cinéaste. Ce dernier, cherche une forme de rédemption, sous la forme d'un projet de film, dont le scénario semble clairement inspiré de sa vie. C'est d'ailleurs ce qui rebute sa fille Nora, à qui il propose le rôle principal. Face à son refus, il décide de choisir une actrice américaine en vogue (une Elle FANNING très juste), sauf que celle-ci a tôt fait de comprendre que seule la fille du cinéaste peut incarner le rôle.

 

S'inspirant de sa propre histoire, Joachim TRIER façonne avec respect et perspicacité cette mise en abîme, non seulement pour le 7ème Art, dont il dévoile les rouages (du financement, aux répétitions, en passant par le tournage), mais aussi face à la souffrance humaine dont le cinéma s'est si souvent fait l'étendard. Le Festival de Cannes ne s'y est d'ailleurs pas trompé, en récompensant le film par le Grand Prix de son édition 2025.

 

Le cinéma, comme thérapie ou baume sur des blessures que les protagonistes tant réels que fictifs ne parviennent pas à exprimer, n'est pourtant qu'un ersatz, car la vérité de chacun de ne peut se manifester et prendre toute sa dimension que dans la réalité.  Cette réalité est matérialisée par la maison familiale, personnage à part entière du film, qui sert de réceptacle à l'affect transgénérationnel : gardienne des secrets, des histoires, des joies autant que des blessures et des souffrances.

 

Cette maison représente un héritage tant matériel qu'émotionnel, dans laquelle les schémas, volontaires ou non, conscients ou non, se répètent, permettant aux protagonistes de se confronter à leurs traumas et à leurs origines. Une introspection nécessaire aussi pour les acteurs qui embrassent réellement leurs rôles, parvenant en même temps à faire réfléchir le spectateur sur sa propre histoire.

 

Au final : Un très beau film, qui fait réfléchir au fait qu'il existe toujours plusieurs sons de cloche dans une histoire, quelle qu'elle soit, et d'autant plus si elle est familiale. Bouleversant d'authenticité, de justesse et de simplicité. Immanquable.

 
 
 

Commentaires


Les commentaires sur ce post ne sont plus acceptés. Contactez le propriétaire pour plus d'informations.
Post: Blog2 Post

©2021 par Hors-champ. Créé avec Wix.com

bottom of page